Témoignage de Manon

 

 

Témoignage de Manon, 18 ans

Je me suis toujours sentie différente des enfants de mon âge et ce depuis toute petite. Il y a une sorte de décalage permanent entre nous. Je me demande parfois encore si on vit réellement sur la même planète.
En primaire ça allait, j'aimais bien l'école et j'avais des copines comme tout le monde. Ma petite bande était composée des canards boiteux de la cour de récréation que je récupérais, des enfants moqués par les autres à cause de différences. A cause de ça j'étais un peu rejetée, je m'en rend compte avec le recul. Mais c'était une belle époque, l'innocence et la jeunesse aidant.


Puis est arrivé le collège ; j'ai détesté le collège. C'était un nouveau monde qui ne me convenait pas. Il fallait être ''normal'', ''cool'' et surtout ''populaire'' des valeurs, propres au collège selon moi, que je ne comprenais pas. Mes parents m'ont appris que ce qui comptait était ce que j'aimais, ils m'ont permis de développer mes passions et d'un coup ce que demandaient les autres jeunes pour appartenir à leurs groupes ne correspondaient pas à ce qu'on m'a appris. Douloureuse expérience que de se rendre compte qu'on ne peut pas faire parti d'un groupe parce qu'on est ''anormal''.
Mais les problèmes ont véritablement commencés en quatrième lorsque je suis devenue la tête de turque d'une fille de ma classe. Ce fut plusieurs mois de cauchemars. Brimades, insultes, isolement forcé... les mots ont bien plus de pouvoir que ce que l'on peut croire. A bout j'ai fini par prévenir ma mère et le collège. Mais le mal était fait. L'année suivante j'ai commencé à être suivie par une psychologue, le suivi a duré deux ans.

L'entrée au lycée était pour moi synonyme de nouveauté, ça devait être un nouveau départ dans un lieu plus vaste avec plus de monde, je pouvais me noyer dans la masse.
Malheureusement la fille s'est retrouvée dans ma classe de langue et a recommencé mon calvaire. La seconde a été difficile. Au fur et à mesure que le temps passait j'aimais de moins en moins aller au lycée, tout devenait pénible malgré des résultats scolaires satisfaisants. En première j'ai commencé à angoisser sérieusement et mon professeur principal me terrorisait.
Mais cette année ça n'allait plus, je demandais tout les matins à ma mère de ne pas aller en cours. A la Toussaint ça a été trop dur, je n'ai pas pu retourner au lycée ; à chaque fois que je tentais je faisais des crises d'angoisse.

C'est à ce moment-là que mon nouveau psy m'a parlé de zébra. Ça faisait un an qu'il me parlait de la précocité et du fait d'être zèbre. Il m'a fallu un an pour l'accepter et c'est à ce moment-là que je me suis rendue à l'évidence. En fait zèbre était pour moi trop associé aux clichés du génie, de l'élève premier de classe avec des lunettes (chose que j'ai vécue et qui m'a fait souffrir) et il m'a fallu du temps pour comprendre que ce n'était que des préjugés et que ce n'était pas ça être zèbre.
Actuellement je suis déscolarisée et je vais à zébra deux semaines par mois. J'adore cet endroit, je passe les semaines chez moi à attendre de pouvoir y retourner. Dès que j'y suis allée je me suis sentie dans mon élément. Pour moi, zébra c'est un lieu où j'arrive à trouver la paix au fur et à mesure. J'y suis dans mon élément. L'absence de contraintes, d'obligations et de réprimandes (vécues très mal dans le système scolaire) m'a soulagée. Tout se passe tranquillement et sans stress. Les personnes de zébra sont géniales, elles comptent beaucoup pour moi et m'aident vraiment à aller mieux. Grâce à elles je sais que j'ai des personnes sur qui compter.

Là-bas j'ai enfin rencontré des jeunes comme moi ce qui n'était jamais arrivé auparavant. Je me sens bien avec eux, il n'y a pas de tensions, on se comprend. Je me suis toujours sentie isolée, j'ai longtemps pensé que quelque chose clochait chez moi et je me rend compte que je n'avais juste pas encore rencontré les bonnes personnes. On fait des ateliers, on parle entre nous, on joue, on s'amuse. Chacun essaie d'aller mieux et d'aider les autres à aller mieux. On s'entraide, on est bienveillants les uns avec les autres.
Rien n'est gagné, je vais pas vraiment mieux car l'expérience de Zébra vient juste de débuter mais maintenant j'ai beaucoup plus confiance dans l'avenir. Cette année sera une année blanche et l'an prochain je passerais le bac littéraire avec le CNED et zébra avant de partir dans des études d'édition. Je me vois bien éditrice plus tard :)